mercredi 30 mars 2011

Fukushima – état des lieux au 28 mars


Le 11 mars dernier, le Japon était frappé par une série de catastrophes, naturelles et industrielles. Aujourd’hui, après le tremblement de terre et le Tsunami, le bilan est particulièrement lourd pour le pays. Selon l’OMS, le bilan est de 10 489 morts, 16 621 disparus et 2 285 blessés. Plus de 88 000 maisons et bâtiments ont été complètement ou partiellement détruits. Dans les abris d’accueil d’urgence, ils sont 20 000 évacués de la zone des 20km autour de la centrale nucléaire de Fukushima. Car au Japon, et à Fukushima, la catastrophe est en cours.


A Fukushima, le cauchemar n’est pas terminé

L’ASN française le déclarait ce 28 mars lors de son point presse matinal : « la situation reste précaire ».
En effet, en analysant les informations parcellaires et chaotiques transmises par les autorités japonaises et TEPCo, l’exploitant de la centrale, l’état des réacteurs et de leurs piscines est extrêmement préoccupant.

Dans les réacteurs 1&2, l’électricité a été partiellement rétablie, les salles de contrôle sont alimentées, les éclairages allumés. Mais les systèmes de refroidissement de ces réacteurs n’ont pas été re démarrés. De l’eau, chargée en radioactivité a été détectée dans les bâtiments de ces deux réacteurs, avec plus de 1 000 millisieverts (1 000 mSV) de concentration dans le réacteur n°2, une dose extrêmement élevée (la dose annuelle limite pour les travailleurs du nucléaire est de 250mSv ! ). Ces niveaux de dose rendent très difficile toute intervention humaine dans les bâtiments.
Le réacteur 3 est celui qui concentre toutes les inquiétudes, en effet, ce réacteur est « moxé » donc particulièrement chargé en plutonium. L’ASN souligne d’ailleurs que « les relevés de pression au sein des enceintes semblent permettre de conclure, pour les réacteurs 2 et 3, à une perte d’étanchéité de l’enceinte métallique ; »

La présence de cette eau fortement radioactive confirme les suspicions d’inétanchéité des enceintes ou des circuits de refroidissement des réacteurs n°2 et 3.
Le réacteur 4 a également été raccordé au circuit électrique, mais les équipements ne sont pas encore sous tension. Dans les réacteurs 5&6, les systèmes de refroidissement sont alimentés en électricité et fonctionnent.

Dans les piscines de stockage des réacteurs, le niveau d’eau est à priori remonté grâce aux aspersions d’eau douce, et la température aurait été ramenée à des températures moins inquiétantes. Voir la note de l’IRSN sur le sujet.

Il faut élargir la zone d’évacuation


View Map of Radiation Measurements by Greenpeace team in a larger map

Greenpeace a envoyé une équipe d’experts en radioprotection dans la zone de la centrale de Fukushima. (voir les portraits de l’équipe ici - en anglais

Cette équipe a confirmé des niveaux de rayonnement de dix micro Sievert par heure dans le village de Iitate, à 40km au nord-ouest de la centrale de Fukushima / Daiichi et à 20 km au-delà de la zone d’évacuation officielle. Ces niveaux sont suffisamment élevés pour exiger l’évacuation.

D’un point de vue sanitaire, il n’est pas anodin de rester dans cette zone, tout particulièrement pour des personnes « à risques » comme les enfants et les femmes enceintes, qui pourraient recevoir, en quelques jours la dose annuelle maximale de rayonnements.

Claude-André Lacoste, lors du point presse quotidien de l’Autorité de sûreté nucléaire, ce lundi 28 mars déclarait d’ailleurs : « il y a l’évidence une contamination, qui va s’étendre sur des zones considérables » [...] Ce n’est « pas du tout étonnant qu’on trouve ici ou là des contaminations, bien au-delà d’un rayon de 100 km » [...] « L’ASN ne dispose pas de « chiffres globaux » sur ces contaminations. La gestion de ces zones prendra des années, voire des décennies« .

Il est temps de faire face et d’entendre les recommandations des scientifiques

Le bureau allemand de Greenpeace a préparé un rapport, rédigé par un spécialiste en sécurité nucléaire, le Dr Helmut Hirsch qui établit qu’en raison des quantités de radioactivité libérée, l’accident de Fukushima relève du niveau 7 sur l’échelle INES.
Le rapport du professeur Hirsch se base sur les données publiées par l’ IRSN (institut français de radioprotection et de sûreté nucléaire) et le ZAMG, l’institut de météorologie et de géodynamique autrichien. La quantité totale des isotopes iode-131 et Césium-137 libérés entre le 11 et le 23 mars est tellement élevée que l’accident de Fukushima se place au niveau 7 de l’échelle INES (International nuclear event scale).

Ce rapport peut être téléchargé ici en anglais

Les autorités japonaises doivent impérativement mettre en place des mesures pour protéger la population des risques qu’elle encourt. L’heure n’est pas à rassurer : les responsables japonais doivent agir en fonction de ce que les scientifiques recommandent.

OGM : il est interdit d’interdire


Paolo Mengozzi, avocat général de la Cour Européenne de Justice (CEJ), a estimé en début de semaine que la clause de sauvegarde imposée par la France depuis février 2008 au maïs MON 810 était illégale. Selon lui, les autorités françaises ne pouvaient pas suspendre la culture du maïs génétiquement modifié MON 810 sur le territoire national sans avoir demandé, au préalable, à la Commission d’adopter des mesures d’urgence en cas de risque pour la santé et l’environnement.

La Cour de Justice de la cour européenne avait été saisie sur le sujet par le Conseil d’État, lui-même saisi Monsanto et ses complices habituels, dont l’AGPM. Cet avis de Paolo Mengozzi n’est certes pas contraignant et il faudra encore attendre le verdict des juges. Mais ceux ci suivent dans 80% des cas les conclusions de l’avocat général.


Le maïs MON810 n’a pas été correctement évalué par l’UE

La question centrale ici, n’est pas le respect ou non des procédures, comme semble le penser M. Mengozzi ! La question est bel et bien celle de la validité des procédures d’évaluation de l’Union Européenne.
En effet, les procédures européennes d’évaluation des risques environnementaux et sanitaires potentiels des plantes génétiquement modifiées sont très insatisfaisantes, comme l’ont souligné les ministres européens de l’environnement, à l’unanimité, en décembre 2008.

D’après l’avocat général, la France se devait d’aviser Bruxelles avant d’invoquer cette clause de sauvegarde, par ailleurs en vigueur dans six autres États membres également partisans d’une application stricte du principe de précaution : l’Allemagne, l’Autriche, la Bulgarie, la Grèce, la Hongrie et le Luxembourg.
Cette condition est absurde, quand on sait que la Commission attaque quasi systématiquement les États membres qui suspendent la culture de produits génétiquement modifiés sur leur territoire.

Offensive de Monsanto à l’approche du réexamen des licences

Cette décision intervient alors que la licence décennale du maïs MON 810, seule semence transgénique actuellement autorisée à la culture en Europe avec la pomme de terre Amflora (BASF), est actuellement en cours d’examen.

A nouveau, les multinationales comme Monsanto sont prêtes à utiliser tous les moyens possibles pour imposer leurs OGM dans les assiettes et les champs européens.
Quel que soit le verdict de la CEJ, la France doit maintenir sa clause de sauvegarde et protéger ses citoyens !

Pétrole de schiste : les forages démarreront bien le 15 avril !

On a cru à une bonne nouvelle. Le 11 mars dernier, les médias et les listes de diffusions l’annonçaient : le Premier ministre François Fillon rassure les français en annonçant que sur le gaz et les huiles de schiste, rien ne passera avant la mi juin.

Voici les termes de la lettre envoyée par le Premier ministre à Nathalie Kosciusko-Morizet (Ecologie), Claude Guéant (Intérieur) et Christine Lagarde (Economie): « je vous demande de bien vouloir mettre en oeuvre, dans la limite de vos attributions respectives, les procédures administratives nécessaires pour qu’aucune opération de forage non conventionnel ne soit engagée avant que les rapports n’aient été rendus publics. »

Et lorsqu’on décrypte les méandres de la communication de Matignon, la situation en Seine et Marne et dans l’Aisne n’a pas du tout bougé avec la décision et déclaration de François Fillon. Avec ce courrier, le Gouvernement a mis en œuvre un bel exercice de style mais n’a freiné ou arrêté concrètement. Au contraire, il autorise noir sur blanc, dès le 15 avril, des travaux de forages verticaux –dits conventionnels- qui ne sont en fait que la première étape vers de la fracturation hydraulique.

Dans un article paru dans le Parisien Seine et Marne édition du 13 mars, on découvre que Toréador et Hess répondent eux même aux journalistes qu’ils comptent bien débuter leurs opérations de forages dès le 15 avril. Après quelques recherches auprès de sources bien informées, il semble que, malgré l’annonce du premier ministre, les travaux de forage préliminaires débuteront bel et bien sur les premiers permis –comme celui de Doue- dès la mi-avril.

Il ne s’agit bien évidemment pas encore de fracturation hydraulique mais de leurs préliminaires… Les industriels du pétrole n’ont donc pour l’heure rien changé de leurs plans, à peine ont-ils été pour l’heure un peu décalés.
Le gouvernement semble naviguer à vue, et beaucoup plus négocier avec les dits industriels qu’écouter l’immense mobilisation qui est monté au sud comme au nord contre les gaz et pétroles de schiste.